Maxime DELALANDE
Chassé-e-s de nos rêves Eprouvé-e-s par nos gestes
printemps 2024

Que faire au sortir de l’école d’art (Ecole supérieure d’art et de design TALM d’Angers, puis Académie des Beaux-Arts de Bruxelles) ? La réponse de Maxime Delalande est claire : demeurer vivant parmi les vivants. La question du sujet de l’art est toujours liée à la fois à l’origine et à la perte, c’est à dire au flux de la vie et à sa disparition. Aussi convient-il de mettre en place des dispositifs d’apparition, de mémoire et de temps, afin d’aller aux choses mêmes, aux forêts, aux marais, aux lieux malmenés pour y révéler la vie secrète des formes mutantes. La vie tout court. Être aux aguets, ne pas seulement regarder mais être dedans, ouvrir l’oeuvre aux errances, fixer les passages, noter les remous. Sans doute sera-t-il possible alors de ramener au jour ces « images originaires » ces Urbilder qui ont longtemps captivé le philosophe Walter Benjamin.

Dans les forêts comme aux abords des marais ou des étangs, dans les carrières ou les sablières que cherche-t-on ? Que pourrait-on trouver ? On ne peut se départir de l’idée selon laquelle les rêveries de la carrière et de l’étang possèdent un sens commun, en partie voilé : quelque chose, une vie, vient du fond secret et oublié pour nous parler ou, tout simplement, nous rencontrer, ainsi que cette larve de tricoptère à fourreau et son étang où ciel et terre se rejoignent, en pleine forêt de Tronçais, non loin de la résidence. Ces images inattendues sont un mélange de révélation et d’énigme : tout en elles est semblable au battement d’ailes de l’oiseau où le risque et la chance se confondent. Car en réalité le secret n’existe pas. Il n’est que l’une des formes innombrables de l’inaperçu. Tout ce que la science et l’art sont à même de révéler par leurs pratiques, s’extirpe de l’enfouissement du caché, pour monter au jour et gagner la lumière. Arrachées au mystère, les apparitions prennent alors place dans cette part du monde où la beauté anime tout ce qui tombe sous notre regard. Nous sommes vivants parmi les vivants, êtres parmi les êtres, présences dans le temps. Celui qui nous est imparti et celui qui nous enveloppe.

Maxime Delalande, Paysage bourbonnais, extraits de routes forestières, 2024, acryl., huile et pigments naturels sur toile. Ardoise ocre pâle, route de la Mouche; bourgeons de charme oriental, rond (rd) des Chamignoux; feuilles de jeunes chênes, route de la Bouteille; fleurs de genêts hirsute, la Chaume; grès rouge, fontaine (ft) de la Compassion; bourgeons d’épicéa de Sibérie, rd de la Cave; racines de prunellier Spinosa, rt de Soulice; roche calcaire ocre pâle, ft Verniole, 200 x 270 cm.

Pour son exposition de sortie de résidence au DomaineM, Maxime Delalande invite Eve Champion et Bastien Courdavault, tous deux passés par l’Ecole d’Art et de Design TALM, de Tours. Amitié et convergence des luttes.

A gauche : Eve Champion, Chasse gardée, 2023, cyanotypes, texte machine à écrire, acajou, frêne ou chêne de récupération – A droite : Maxime Delalande, Paysage bourbonnais, extraits des routes forestières, 2024, acrylique, huile et pigments sur toile, 200 x 270 cm.

EDITION : Les cahiers / n°28 Maxime Delalande – Sommaire : Michel Cegarra, « Portrait de l’artiste à la presse à lithographie. Dessiner sur la pierre », suivi de : « Empreintes du vivant. Dispositifs d’apparition, de mémoire et de temps » – Maxime Delalande – Les images – Format A5, dos carré, 68 pages, 24 illustrations noir et blanc et couleurs, édition DomaineM, mai 2024 – 10€. Disponible.